Introduction
Depuis le 1er juillet 2025, les législateurs ont profondément réformé la procédure de saisie sur rémunérations.Elle repose désormais sur une plateforme dématérialisée, sans passer par le juge dans la majorité des cas. Pour les propriétaires bailleurs, cette réforme est une opportunité de récupérer plus rapidement des loyers impayés, sous réserve de respecter certaines conditions indispensables. Cet article détaille les règles, étapes, avantages et limites de ce nouveau dispositif, ainsi que des cas concrets pour mieux comprendre son application pratique.
1. Le titre exécutoire : fondement indispensable pour le bailleur
Avant toute saisie, le bailleur doit impérativement disposer d’un titre exécutoire, conformément à l’article L.111-3 du Code des procédures civiles d’exécution. Sans ce document, aucune saisie n’est possible.
1.1 Les types de titres exécutoire admis
Trois types de titres sont valables en matière locative :
- Jugement rendu par un tribunal judiciaire
Le bailleur saisit le tribunal judiciaire (ou de proximité selon le montant dû), en fournissant le bail, les relevés des impayés et les échanges de relances. Après une éventuelle phase de conciliation, le juge rend un jugement exécutoire immédiatement après sa délivrance par le greffe.
Coût estimé : frais de greffe (quelques dizaines d’euros), éventuels honoraires d’avocat facultatifs mais recommandés. - Injonction de payer devenue définitive
Procédure simplifiée adaptée aux loyers impayés de faible montant. Le bailleur dépose une requête en injonction de payer. Si le locataire ne conteste pas sous 15 jours, l’ordonnance devient définitive et fait office de titre exécutoire.
Attention : une simple mise en demeure, même envoyée en recommandé, ne vaut pas titre exécutoire. - Acte notarié revêtu de la formule exécutoire
Le bailleur peut faire signer au locataire (et aux garants) un acte authentique, intégrant la formule exécutoire, mentionnant la nature de la dette (loyers, charges, intérêts) et l’accord exprès du débiteur à l’exécution forcée.
Tarif : entre 200 et 400 €, à la charge du bailleur (frais pouvant être refacturés si le locataire reconnaît la dette). Maitre Adrien Gerard peut vous aider.
2. Le rôle central du commissaire de justice (ex-huissier) dans la procédure
Depuis la réforme, le commissaire de justice devient un acteur clé, remplaçant dans la majorité des cas l’intervention du juge.
2.1 Quand intervient-il ?
Il intervient dès que le bailleur dispose d’un titre exécutoire, que ce soit un jugement, une injonction devenue définitive ou un acte notarié.
2.2 Étapes de son intervention
- Vérification du dossier
Le commissaire contrôle la validité de la créance, la présence d’un titre exécutoire, et l’absence de contestation sérieuse. - Mise en demeure et tentative amiable
Il envoie une mise en demeure au locataire, ouvrant un délai pour payer ou négocier un échéancier. - Commandement de payer
En l’absence de règlement, il délivre un commandement de payer et inscrit ce commandement au registre national des saisies des rémunérations. - Mise en œuvre de la saisie
Il notifie la saisie à l’employeur ou tiers débiteur, qui prélève une part du salaire selon le barème légal. - Action contre les garants
Le commissaire peut aussi agir directement contre le garant solidaire, selon les mêmes modalités.
2.3 Coût de l’intervention
La réglementation encadre les frais, que le bailleur avance généralement, mais qu’il répercute sur le locataire ou le garant défaillant.
Exemples approximatifs :
- Mise en demeure : 15 à 40 €
- Commandement de payer : 25 à 50 €
- Saisie sur salaire : 130 à 200 €
- Saisie bancaire : 130 à 300 €
- Signification d’acte au garant : 20 à 60 €

3. Déroulement de la saisie sur rémunérations depuis la réforme
3.1 Dépôt de la demande via plateforme numérique
Le bailleur ou son mandataire dépose en ligne sur la plateforme nationale gérée par l’Agence de gestion des saisies une demande comprenant le titre exécutoire, les coordonnées du débiteur et le montant dû.
3.2 Identification automatique de l’employeur
La plateforme interroge les bases de données (URSSAF, Pôle Emploi, DGFIP) pour identifier l’employeur ou la source de revenus saisissables. Si elle échoue, la procédure est suspendue.
3.3 Mise en œuvre de la saisie
Une fois l’employeur identifié, le commissaire notifie la saisie, qui se traduit par un prélèvement mensuel sur le salaire, dans le respect du barème de saisie tenant compte du reste à vivre.
4. Le contrôle judiciaire
Le juge de l’exécution n’intervient plus a priori dans la procédure. Le locataire peut contester la saisie dans un délai d’un mois après le commandement de payer. Ce recours est suspensif s’il est formé dans ce délai. Au-delà, la saisie continue malgré tout.
5. Traitement des procédures en cours au 1er juillet 2025
Le bailleur peut poursuivre sous l’ancien régime, pendant trois mois, les procédures qu’il a engagées avant cette date ; passé ce délai, si le bailleur ne confirme pas sa volonté de poursuivre avec un commissaire de justice, ces procédures deviennent caduques.
6. Avantages de la réforme pour les bailleurs
- Simplification et rapidité : la saisie dématérialisée permet un recouvrement en 1 à 2 mois contre 6 à 18 mois auparavant.
- Désengorgement des tribunaux : le juge intervient seulement en cas de contestation.
- Centralisation via un registre national : évite les conflits et les saisies multiples.
- Garantie de droits pour le débiteur : respect du barème et maintien d’un reste à vivre adapté.
7. Limites et inconvénients
- Impact sur les locataires précaires : même si RSA et AAH sont exclus, une saisie sur petit salaire peut fragiliser le débiteur.
- Coûts transférés au locataire : frais de signification et d’exécution aggravent la dette.
- Moins de médiation possible : disparition de la phase judiciaire limite les négociations.
- Complexité technique : usage de la plateforme et collaboration avec le commissaire demandent un certain savoir-faire.
8. Cas pratiques fréquents
- Cas n°1 : Étudiant locataire avec garant étranger
Les garants résidant hors UE ne sont pas concernés par la saisie sur salaire. Une procédure internationale complexe est nécessaire, souvent coûteuse. - Cas n°2 : Locataire salarié avec garant en France
Le commissaire peut agir sur les salaires du locataire et du garant, à condition que le bailleur ait inclus ce dernier dans le titre exécutoire par assignation. - Cas n°3 : Locataire freelance sans employeur
Pas de saisie possible sur salaire, mais d’autres voies restent ouvertes : saisie sur compte bancaire, saisie mobilière, ou intervention via les clients. - Cas n°4 : Locataire freelance avec garant salarié
La saisie peut s’exercer sur le salaire du garant si celui-ci est visé dans le titre.
Conclusion
La réforme du 1er juillet 2025 modernise le recouvrement des loyers impayés avec titre exécutoire solide et procédure dématérialisée. Le commissaire de justice joue un rôle central dans cette procédure.
Cet outil offre aux bailleurs un moyen puissant d’accélérer les recouvrements, à condition d’être bien accompagnés et de maîtriser étapes.
Le locataire conserve un droit de contestation, mais peut voir son pouvoir d’achat affecté.
Pour sécuriser vos démarches, faites appel à un commissaire de justice compétent. Vous pouvez également faire appel à un professionnel de la gestion locative, tel que Ludael Immobilier.
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